La CSSCT, le parent pauvre du CSE : comment changer la donne ?

CCR

10/15/2023

La Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT) joue un rôle crucial au sein du CSE : elle se voit très logiquement déléguer tout ou partie des prérogatives de santé et de sécurité dévolues au CSE depuis les ordonnances de 2017.

Cependant, alors que les premières mandatures arrivent à leur terme, il apparaît que cette commission est souvent négligée, voire marginalisée. Le Code du Travail ne lui accorde plus aucun moyen propre, contrairement à l'ancienne instance, le CHSCT, auparavant reconnue comme une instance influente pour tous les thèmes gravitant autour de l'amélioration de la sécurité et des conditions de travail.  Cette situation soulève une question essentielle : comment peut-on changer cette dynamique et donner à la CSSCT la reconnaissance et l'influence qu'elle mérite ?

1. Comprendre le rôle de la CSSCT

Importance et missions de la CSSCT

La CSSCT a pour mission principale de contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, ainsi qu’à l’amélioration de leurs conditions de travail. Elle est chargée par le CSE d'analyser, entre autres,  les risques professionnels, d'étudier l'environnement de travail et de prévenir les risques psychosociaux. Elle participe à l'élaboration du document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP) et à celle des plans de prévention.

Les enjeux de la CSSCT

Malgré un rôle essentiel, la CSSCT doit faire face à une pénurie de ressources pour mener à bien ses missions. Cette insuffisance se manifeste  de plusieurs façons : un manque de temps, un manque de formation, un manque d'informations. En effet, bien que la CSSCT soit composée d'une partie des élus du CSE, qui disposent de toutes les ressources en temps et en décisions, les responsabilités et les rôles restent ambigus et les contours des mandats d'élu du CSE et ceux de membre de la CSSCT sont, au mieux changeants, voire complètement flous. Même si le CSE délègue ses prérogatives de santé et de sécurité à la CSSCT, seuls les membres du CSE disposent des moyens d'action, y compris la capacité à demander des expertises ou à exercer les différents droits d'alerte. Ainsi, lorsqu'un élu est déjà occupé par des questions économiques, la partie SSCT risque d'être reléguée au second plan. Un élu ne devrait pas avoir à faire ce choix, pourtant on constate que c'est ce qui se produit souvent.

Il apparaît dès lors, que la CSSCT doit disposer de véritables ressources pour exister, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui : elle est devenue une simple commission établie par le CSE, au même titre que les autres commissions. Cela signifie qu'elle ne peut agir et exister que si le CSE lui en donne les moyens.

2. Négocier des moyens pour la CSSCT

Il devient donc indispensable de négocier de réels moyens pour la CSSCT afin qu'elle puisse accomplir efficacement sa mission :

  • en adaptant le Code du travail, bien que cette solution soit probablement la moins réaliste car elle remettrait en question la façon dont le dialogue social a été repensé par la loi travail ;

  • par un accord spécifique de mise en place ou de fonctionnement du CSE au niveau de l'entreprise : pour cela il est nécessaire que les organisations syndicales et les employeurs aient une vision commune du rôle que doit jouer la CSSCT ; 

  • par une modification du règlement intérieur du CSE, qui, même s'il ne crée pas  de moyens supplémentaires, peut dans le cadre de la législation et des accords existants, préciser de manière cohérente et dans les détails comment va fonctionner la CSSCT. C'est a minima la voie à suivre pour libérer les membres de la CSSCT des injonctions parfois contradictoires auxquelles ils sont confrontés.

Formation des membres de la CSSCT

La formation des membres de la CSSCT est un facteur déterminant pour assurer leur efficacité. Ils doivent recevoir une formation sur les risques spécifiques de l'entreprise et sur la réglementation en matière de santé et de sécurité au travail. La négociation de moyens pour cette formation est donc très importante et doit aller au delà de la formation initiale obligatoire prévue par le Code du Travail. Les 5 jours prévus par mandat de 4 ans ne peuvent pas couvrir l'ensemble des connaissances  théoriques à acquérir.

Une formation continue est nécessaire pour s'assurer que les élus restent au fait des dernières normes de sécurité et de santé au travail. Il incombe à l'employeur et au CSE de veiller à ce que cette formation soit constante et de qualité.

Négociation des moyens matériels et financiers

La CSSCT nécessite des ressources matérielles et financières pour mener à bien ses missions. Cela comprend le financement de formations spécifiques, l'achat de matériel nécessaire pour réaliser des études de risques, ou plus généralement du matériel servant à communiquer sur ses actions. Le CSE devrait envisager de consacrer une partie spécifique de son budget de fonctionnement à la CSSCT. De plus, l'employeur devrait voir la CSSCT comme un partenaire dans sa politique HSE, et donc contribuer à ce qu'elle dispose de moyens adéquats pour remplir le rôle qui lui a été attribué.

Négociation du temps dédié à la CSSCT

Outre les moyens matériels et financiers, la CSSCT a besoin de temps pour mener à bien ses missions. Cela comprend le temps pour se réunir, pour réaliser des études de risques, se former, etc. Rappelons que les heures consacrées aux missions de la CSSCT sont fusionnées avec les heures de délégation dédiées aux autres prérogatives du CSE (économiques et sociales). Comment alors garantir que les missions de santé et de sécurité puissent être correctement exercées ? Cela passe par une négociation avec l'employeur et lorsque cela n'aboutit pas, au sein même du CSE via l'éventuel transfert ou la mutualisation d'heures vers les élus en charge de ces missions.

En valorisant son rôle vital, en allouant les ressources nécessaires et en encourageant une communication efficace, il est possible de changer la donne et de transformer la CSSCT en l'acteur clé qu'elle devrait être pour la santé, la sécurité, et les conditions de travail au sein de l'entreprise, à l'instar de ce qu'était le CHSCT auparavant. Si la CSSCT n'a pas de pouvoir décisionnel ou coercitif, sa force réside dans sa capacité à impulser un dialogue social constructif autour des thématiques essentielles que sont la santé, la sécurité et les conditions de travail.

(mise à jour 15.05.2024)

sécurité au travail
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